quel est le bénéfice secondaire vous pouvez tirer de votre symptôme?
Voila une question que je pose quasiment systématiquement et manière très mal adroite la plus part du temps. en efffet si mes patients viennent chercher du réconfort, mon objectif est que vous puissiez modifier l'éclairage que vous avez de votre situation.
Le bénéfice secondaire est pour moi un sujet important dans mes soins, ou la représentation de la maladie. D'une manière encore très logique, je ne pense pas que Dame nature face tout pour nous embêter ou nous empêcher d'avancer. en effet, depuis 3,8 milliards d'années, Elle s'est toujours efforcée de maintenir la vie sur terre. Alors il est vrai que parfois en voulant bien faire cela puisse ne pas toujours aller dans notre sens de manière consciente.
Parfois nous forçons bien nos enfants à aller dans une direction car nous pensons que c'est la meilleure pour eux, alors pourquoi ne ferait elle pas pareille?
nos soucis peuvent présenter des avantages parfois insoupçonnés, ce qui explique pourquoi, parfois, nous avons tant de mal à les solutionner.
Un bénéfice secondaire est d'après le docteur Fauré "le fait de tirer un bénéficie conscient ou non d'une situation qui a priori est défavorable mais dont l’arrêt signifierait la perte du bénéfice en question". En gros le bénéfice secondaire est un gain que l'on tire d'une situation qui a priori serait négative. Il s'agit de tous les avantages que nous tirons d'une situation qui paraissent ne pas aller en notre faveur et que si la situation venait à évoluer nous perdrions ses avantages.
il est pour moi important de chercher les bénéfices secondaires de toute situation. Cela permet déjà d’être le plus honnête avec soit. Cette recherche améliore la compréhension d'une situation qui devient chronique ou de la perdurance d'un symptôme.
pour mieux comprendre je me permets de vous raconter le cas caricatural d'une patiente. Un jour une jeune femme revient en deuxième rendez vous pour des douleurs d'épaule. Je luis demande ce que je peux faire et elle me répond "rien". Etonné, je lui demande pourquoi et en toute honnêté elle m'énonce une dizaine raisons très pragmatiques sur l'avantage qu'elle tire de cette douleur. A aucun moment il nous faut remettre en question l'existence ou non du symptôme car il est malgré tout bien réel. Cette dame a bien mal et ça l'enquiquine fortement mais en toute honneté elle m'assure préférer avoir mal que :
- laisser sa fille chez la nourrice,
- faire 50km par jour,
- subir les foudre de ses clients
- se faire rabaisser par son employeur
- revoir se mari en faire moins à la maison
- rembourser l'emprunt de sa maison pris en charge par son assurance.
ce n'est pas pour autant qu'elle ne pâtit pas de ne pas pouvoir prendre sa fille dans les bras.
M Vachon nous décrit 9 types de bénéfices secondaires:
- l'habitude ; le symptôme fait partie d'une habitude rassurante. Certaines personnes restent avec leurs conjoints car c'est comme cela depuis des années. Elles savent bien que leurs couples ne leurs apportent que tristesse et désolation mais elles peuvent avoir peur de l'inconnu.
- la loyauté : le soucis me rend fidèle et loyal à mon passé, à mes ancêtres. J'ai un cancer du colon comme mon père, mon grand père mon arrière grand père, c'est un truc familiale quoi.
- la protection ou l'évidement : le symptôme me protège d'autres soucis. Cela peut être le fait de ne jamais dire non par peur de décevoir, "alors tu comprends, mon chéri que j'aimerai venir voir ta mère (grincheuse acariâtre et méchante) mais à cause de mon dos, il faudra faire sans moi. Je peux pas faire de route". Je peux avoir des douleurs qui m'empêchent d'entreprendre une activité sportive par peur de l'échec de la performance.
- l'excuse : le symptôme me sert d'excuse pour justifier un comportement. personnellement lorsque je vais courir, j'ai souvent des douleurs dans les adducteurs au moment même où j'enfile mes baskettes. cela me sert de justification du fait qu'aujourd'hui je ne vais pas courir le nombre de kilomètres voulu car il pleut.
- exutoire : le problème est le symptôme d'un autre problème. pour moi beaucoup de maladie. Je suis constipé car je garde tout pour moi.
- l'occupation : mon symptôme me permet de me focaliser sur lui et il m'évite de penser à d'autres soucis plus important; c'est souvent le cas de certains patients qui viennent me voir pour une petite douleur bénigne et en réalité, se cache un mal être plus profond. C'est souvent le cas aussi du burn out professionnel par exemple qui masque des problématiques personnelles plus importantes.
- identité : mon symptôme est mon identité, ma raison d'être. il fait partie intégrante de mon image de ma personnalité. Quand j'étais kiné, j'ai parfois été étonné par le comportement de certains de mes patients qui semblaient vouloir se débarrasser de leurs douleurs. Malgré tous les moyens mis en place, rien ne progressait. J'avais notamment une dame retraitée, veuve depuis 10ans, qui venait me voir pour des problèmes d'épaule. Elle a dépensé beaucoup d'énergie pour être soulager, entre médecin spécialiste ostéo et acuponcteur. Un jour alors qu'elle me disait que la séance" lui avait fait du bien elle ressort et dans la salle d'attente croise une amie : "Bonjour Geneviève, ça va? moi j'ai mal à l'épaule depuis 4 mois, même orthopédiste ne peut pas s'occuper de moi. Tu ne te rends pas compte de combien je souffre et patati et patata, je suis un cas à part". Sa douleur est devenue le point central de son existence. Toute sa vie sociale et affective tourne autour.
- reconnaissance : le symptôme permet de recevoir la reconnaissance, l'empathie voir l'admiration de nos paires. "je ne sais pas comment tu fais pour continuer à travailler dans ton état, tu as une force de caractère énorme".
- la punition : mon symptôme me puni d'un évènement dont je me sens responsable depuis années. "C'est normal que j'en bave avec ma progéniture car ma maman m'a dit que j'étais insupportable avec elle enfant". J'ai une patient qui a eu une capsulite rétractile après une forte altercation avec mon fils, où il l'a giflé.
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- attestation ou le challenge , mon symptôme me prouve ou prouve aux autres que je suis capable de lui faire face; "contrairement à mon père je dépasserai ma dépression"." Malgré mes douleurs de genou j'arriverai à finir mon marathon". cela peut être recoupé, à mon goût, à celui de l'excuse, "si je n'y arrive pas c'est à cause de mon symptôme."
et j'en rajouterai c'est celui
de la place : grâce à mon symptôme je peux retrouver ma place ou les personnes autour peuvent retrouver leur place. c'est le cas d'une de mes patientes qui majore sa dépression dès que son mari est un peu plus indépendant; Sa dépression lui "sert" à retrouver sa place avec son mari.
Il faudra garder en tête que les bénéfices secondaires peuvent touchés aussi l'entourage de la personne.
il se peut d'ailleurs que dans les bénéfices secondaire se cache le sens du symptôme. j'ai une patiente qui se plaint de douleur de cheville l'empêchant d'aller courir. je luis demande l'intérêt de ne pas aller courir, elle me dit : rester à la maison avec mes enfants. Il était nécessaire de rester avec ses enfants pour les protéger de leurs papa qui mettait une pression très forte dans la maison. elle était tiraillée entre le fait de prendre du temps pour elle, et de ne pas quitter la maison même peu de temps par peur de ce qui pouvait se passer. sa cheville a pris la décision pour elle.
comment découvrir ces bénéficies secondaires :
Lorsque l'on trouve les bénéfices secondaires d'un symptôme cela nous permet de mieux accepter le symptôme. parfois de pouvoir le supprimer et souvent de le remercier.
Lorsque nous trouvons un sens aux choses, aux événements que nous vivons, nous pouvons alors ne plus subir ce qui nous apparaissent comme malédiction, et ainsi nous demander comment faire autrement.
il faut répondre à la question : qu'est ce qui a changer de façon positive dans ma vie depuis que j'ai cela. Qu'est ce que j'ai en plus et qu'est ce que mon entourage a en plus? il est aussi nécessaire de ce demandé qu'est ce que cela me permet d'enlever comme contraintes pour moi et pour mon entourage?
Pour modifier nos comportements, il nous faut en être acteur. Si nous prenons les bénéfices secondaires d'une victimes, ils peuvent être énormes : reconnaissance sociale et protection, attirer l'attention sur soi, justification de n'avoir aucun contrôle sur ce qui nous arrive, fuite des responsabilités, alors parfois elles restent inconsciemment dans cette situation, la pérennise. "Ce n'est pas de ma faute personne ne même." En non possession de moyen d'agir elles subissent. vous enlevez un conflit, elles sortent du cabinet du psy, microkiné, hypno et autres professionnels de santé et paf elles en rechoppent un. Mais ce n'est pas de leurs faute. Lorsqu'elles prennent conscience de la notion de bénéfice secondaire, souvent elles sortent alors de leurs rôle de victime quasiment immédiatement. elles reprennent pleinement conscience de leurs actes et de leurs responsabilité.
En ce qui concerne les événements que nous ne pouvons pas changer, la recherche des bénéfices secondaires permet de mieux accepter l'évènement, de lui donner une raison ou un sens. Lorsqu'une ami a perdu un ami proche, après une phase de deuil, elle m'annonce que grâce au décès de ce "petit jeune", elle mettrait plus d énergie dans le projet qu'il soutenait pour lui donner plus de sens, un nouveau souffle. Cela permet ainsi de donner un sens à un événement qui est difficile à accepter. Le symptôme, l'événement peut ne plus être une fatalité, mais nous pourrions le voir comme une chance, une chance d'évoluer de grandir ; une chance d'accepter et de ne pas subir ; une chance de rentrer en résilience.
je ne sais pas si vous connaissez Mickaël Jérémiasz. il a été le porte drapeau des JO de Rio paralympiques. Je vous invite, pour comprendre les nombreuses facettes des bénéfices secondaires d'écouter ses interviews où il parle de son handicap, sa reconnaissance sportive, sociale, ses associations etc.